12 juillet.
Au final, notre chambre spartiate nous a permis de passer une bonne nuit. Je me suis endormi tôt avant 22h30, et évidemment, c’est la nuit où il faut aller à l’extérieur pour se soulager, que je dois me lever deux fois. La deuxième fois, à 4h du matin: il pleut, le vent souffle très fort, il fait glacial. Pas facile de rester endormi. Mais néanmoins, je peux me rendormir pour la fin de ma nuit, et lorsque je m’éveille à 7h30, Sam est déjà levé. Le vent semble un peu tombé, et la première chose que nous faisons, c’est regarder la météo. On sait que ce sera une journée pluvieuse, et on se rend compte qu’en fait, la pluie vient de notre ville de destination, à notre rencontre, et qu’on a donc intérêt à partir tôt, et aller le plus vite possible, pour la rencontrer le plus tard possible. Elle est programmée pour 13h. Il nous sera impossible d’être à destination au bout des 120km avant cela.
À un moment donné, je me rends compte que le pneu arrière du vélo de Sam est crevé. Le voilà reparti pour une nouvelle intervention. Encore un de ces satanés bouts de métal venus d’un pneu de camion lors d’une crevaison, qui s’est fichée dans le pneu, et a provoqué une crevaison lente.
En sortant, je vois que le ciel est vraiment tout gris. Il y a du vent, mais moins. L’endroit où nous nous trouvons est d’une grande pauvreté et simplicité. C’est la première fois qu’on a vu des sans-abri, des personnes transportant des bouteilles d’alcool. Ce lieu a encore l’air plus glauque dans la grisaille.
Le parcours d’aujourd’hui, c’est 5km en descente. Ensuite, 40km de montée en pente douce pour gagner 600m et arriver à 2150m. Puis, une descente jusqu’à 25km du but, puis du plat. Depuis Urumqi, qui est à 700m, nos étapes ont permis de gagner de l’altitude, lentement, mais sûrement.
Comme d’habitude, je me mets en route le premier. Et dans la montée, je passe devant quelques logements d’une très grande simplicité, avec une pointe de modernité: la présence de panneaux solaires. Le paysage est tout aussi martien. Et plus je monte, plus j’ai l’impression que je vais entrer dans les nuages. Je suis bien évidemment en grand équipement froid et pluie. Il y a aujourd’hui 13 degrés. Ce n’est jamais que 27 de moins que vendredi dernier. Il est autour d’11h30 lorsque j’atteins le sommet. Je fais un arrêt, ce qui me permet d’avoir la confirmation qu’il y a bien encore une voiture blanche qui me suit. Je bois, je me dégourdis les jambes et je soulage un besoin naturel. Pendant ce temps-là, une camionnette arrive en face. En sort un couple. Le gars contourne le vélo et commence à me parler en chinois. Ce que j’ai en main à ce moment-là n’est pas mon traducteur. Dès lors, je ne comprends pas. Mais sans attendre et sans me demander, il entreprend de monter sur mon siège. Mais par le côté, ce n’est pas la façon la plus facile: ça demande une grande enjambée. Il rate son coup, se raccroche au montant du soutien du panneau solaire sur lequel est accroché le bâton de marche qui est mon arme anti-chien errant. Il s’y accroche. Il se détache. Et le voilà les quatre fers en l’air. Je termine prestement mon offrande. Je reviens vers lui qui se relève en riant. Par chance, aucune des deux fixations du bâton de marche ne s’est brisée. Je remets donc celui-ci en place en me transformant en capitaine Haddock. Et sans demander mon reste, je me remets en route.
J’ai beaucoup utilisé la batterie en montant, sachant que la recharge solaire est infime: 75 watts en moyenne. J’espère pouvoir recharger sur le frein en descente. Mais je me trompe lourdement. La déclivité en descente est insuffisante. Dès lors, avec le poids du vélo et le vent un petit peu contraire, je ne peux faire que pédaler pour tenir un bon rythme et essayer d’éviter la pluie. Je consomme donc encore.
Au moment où Sam me rejoint, je lui indique qu’il faudra vraisemblablement recharger. Il reste plus de 45 kilomètres. Nous avisons une station service où il y a des bornes de recharge. Sam dispose de l’adaptateur. Heureusement, il ne peut charger que sur des bornes de recharge lentes. Et ici, elles sont toutes de recharge rapide. Jusque-là, on a eu de la bruine. Petit épisode à 11h15. Et depuis 12h15, en continu. Et au moment de quitter la station, là c’est vraiment la pluie. Je pars de nouveau en avance, convenant que si je trouve un restaurant, on s’y arrête et on recharge. Après 5 kilomètres, je peux appeler Sam et lui dire que j’ai trouvé. Il me rejoint. Malheureusement, le restaurant est fermé. Mais il est combiné à un magasin. On peut acheter un pot de nouilles qui ne demande plus que de l’eau chaude pour être dégusté. Mon vélo est mis en charge. Nous nous restaurons et on attend la fin de la charge. Pendant ce temps, Sam, quelqu’un qui adore chanter, qui chante tous les matins et tous les soirs à l’hôtel, en chinois, en anglais, et même parfois quelques petites comptines en français, me fait entendre des chansons qu’il aime et qu’il chante un peu. « La mer » de Charles Trenet. Ou une autre qui s’appelle « Le papillon ». Petite photo avec le gérant du magasin qui nous a bien rendu service. Et on reprend notre route.
Là, ce n’est plus de la bruine.Ce sera de la pluie bien drue pendant les 36 derniers kilomètres. Sam est devant et je le vois petit à petit disparaître. Tandis que moi, dans mon dos, après la traditionnelle voiture blanche, c’est maintenant une voiture du service des autoroutes, gyrophare allumé, qui va me suivre jusqu’à 6 kilomètres de la ville. Moment où il m’arrête et m’offre de l’eau avant de prendre des photos.
Je me remets en route et je vois que j’ai une nouvelle voiture blanche qui me suit à distance et qui a aussi mis ses feux de détresse. Je constate qu’à un moment donné, ils m’ont perdu dans les quelques virages pour rentrer dans cette ville et rejoindre l’hôtel. Comme notre logement d’hier a coûté 7 euros, mais sans sanitaire, on a décidé de monter un peu en gamme et de prendre un hôtel à 52 euros, soit 26 euros chacun, qui permet à Sam d’aller avec son vélo jusque dans la chambre, ce qui facilite les choses pour les bagages et la recharge. Et quant à moi, je suis autorisé à le placer au sec entre les deux jeux de portes d’entrée avec un accès à une recharge. Voilà un hôtel très sympathique et très ouvert, ce qui n’est pas toujours le cas.
La pluie devrait cesser ce soir. On devrait retrouver le beau temps demain pour l’étape devant nous amener à Hami. Avant cela, il faudra faire sécher tout ce qui doit sécher et un gros nettoyage de la remorque qui a une fois de plus pris 2 kilos de sable dans l’épisode pluvieux du jour. Mais je ne me plains pas: c’est le premier jour de pluie depuis le 13 mai à Nijni Novgorod !
Photos sur Polarsteps.
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