5 juillet.
Malgré un nouveau coucher bien au delà de minuit, je m’éveille vers 8h15, avec l’impression d’avoir malgré tout bien récupéré. Je constate que Sam, qui s’est pourtant couché plus tôt que moi, dort toujours du sommeil du juste. Je ne fais pas de bruit et je laisse donc s’éveiller. Il est 9h. Nous nous rendons au petit déjeuner. Sam m’indique qu’il était à Urumqi il y a une semaine avec des amis. Il en a fait le tour. Et donc, plutôt que d’y venir pendant les deux jours que nous avons prévus d’y passer avec Alicia, il préférerait voir autre chose. Il me propose donc de partir seul, pendant que lui va crapahuter dans la région. Le temps de clôturer les bagages et de charger le vélo, il est 10h15, 10h20, lorsque je me mets en route. Le thermomètre indique déjà 33 degrés.
La sortie de Shihezi est tout confort. Les bandes cyclables séparées par un terre-plein des boulevards sont très larges et d’un revêtement parfait. A un moment donné, je dois prendre à gauche pour rejoindre la G312, mais la route est barrée. Elle est en totale reconstruction. Je dois donc continuer tout droit jusqu’à Manas pour la prendre un peu plus loin. Je suis surpris de voir qu’entre Shihezi et Manas, une quinzaine de kilomètres, il y a là aussi une bande cyclable séparée des grands boulevards par un terre-plein, donc totalement sécurisée. Le seul obstacle que j’y rencontre est un troupeau de moutons que trois hommes tentent avec difficulté de faire traverser. De part et d’autre de la route, je découvre des vignobles. Je rejoins donc la G312. Sam m’avait expliqué que les dix premiers kilomètres étaient uniquement avec une bande dans chaque sens, et donc dangereuses. Sans doute qu’à cause de mon détour, je la prends au-delà de cette portion, parce que ce que je découvre, c’est une deux fois deux bandes avec une large bande d’arrêt d’urgence sur laquelle je m’élance. Dans la traversée des agglomérations, il n’y a plus de bande d’arrêt d’urgence, mais de nouveau une voie latérale séparée de la route par un terre-plein. Il y circule souvent de petits véhicules électriques. Au passage d’un pont, je découvre le panorama sur les montagnes, dont la chaîne se trouve à ma droite, avec des neiges éternelles. La température continue à monter, et je m’abreuve beaucoup. Je suis très content d’avoir mon camelback de deux litres, en plus de mes deux bouteilles thermos. À un moment donné, l’ensemble du flot de circulation est dévié par un parking où se trouve un contrôle de police. Je suis bien sûr arrêté. Je montre mon passeport. Et pour faciliter et accélérer les choses, j’appelle Alicia, qui discute avec les policiers, qui au final me souhaitent bon voyage et me remplissent la gourde qui était vide. Je me relance sur cette route, où je suis au kilomètre 4276. Un quart d’heure après avoir quitté les policiers, je me rends compte qu’une voiture noire, feux de détresse enclenchés, se trouve derrière moi, sur la bande d’arrêt d’urgence, et avance à mon rythme. Parfois, elle me dépasse, se gare à droite, puis reprend. Elle est visiblement en protection. Cela dure de nombreux kilomètres. À un moment donné, le policier passe devant et me demande d’arrêter, puis de patienter. Arrive alors un autre véhicule, blanc, d’où sortent deux hommes en civil. J’use du traducteur pour expliquer ce qu’il en est. Puis la voiture noire disparaît, et voilà que c’est cette nouvelle voiture blanche qui me suit, avec les feux de détresse, en protection, pendant de très nombreux kilomètres. À un moment donné, à un carrefour, elle prend à gauche, mais trois minutes plus tard, c’est une voiture bordeaux qui prend le relais. J’arrive au kilomètre 80, au moment de ma deuxième pause, j’appelle la voiture en question, et par gestes, je demande au chauffeur qu’il me confirme que ce que je vois à ma gauche est bien un endroit pour manger. Il me répond que oui. Je me rends à l’endroit, l’établissement est fermé. Mais à côté, il y a un tout petit magasin de village. Je peux y acheter de l’eau, des fruits, et même un café froid. Je me restaure, et au moment de repartir, il est 14h30 pour moi, 8h30 en Belgique, je reçois le message de bonjour de Joëlle, à qui j’explique que j’ai déjà bu trois litres et demi d’eau sur la matinée, qu’il fait maintenant 40 degrés, et que je viens de racheter deux autres litres et demi. Buvant tant d’eau, elle me conseille de manger salé. Pas de bol, je viens de faire un repas exclusivement sucré… on verra plus tard. Je me remets en route, et ô surprise, la voiture Bordeaux a attendu au carrefour, et se remet en protection. Au total, les trois véhicules m’auront accompagné sans doute 50 kilomètres. Elle me quitte au moment où la route passe à trois bandes, et où il y a aussi un panneau d’interdiction pour les vélos. Heureusement je ne l’ai pas vu, et je poursuis une dizaine de kilomètres. Je me dis que mes amis policiers viendront bientôt m’expliquer comment faire. Au moment où j’entends une sirène, je me dis que le moment est arrivé, mais non, ce sont des pompiers qui traversent. Au bout d’une dizaine de kilomètres, revoilà le panneau d’interdiction. Difficile de ne pas l’avoir vu étant donné son insistance. Je ne peux donc pas emprunter la G312 jusqu’à Urumqi, j’ai dû mal comprendre Sam. Et c’est vrai que Komoot rechignait à me laisser prendre cette route. J’ai dû mettre de nombreux points pour forcer le passage. Je décide donc d’enlever tous ces points, je reçois ainsi un trajet alternatif. À partir du carrefour où je suis, il y a dorénavant une route soit à gauche, soit à droite de la G312. Je peux ainsi progresser vers Urumqi. Il y a bien de temps en temps des routes en reconstruction ou des quartiers en construction devant lesquels la route est barrée. Mais je parviens chaque fois à contourner et à revenir sur ma trace. À Changi, à une quarantaine de kilomètres du but, je suis en surchauffe totale. J’avais prévu un arrêt un peu plus loin, mais il faut que je me climatise. Je m’arrête donc dans un restaurant où il fait bien frais. Puisque j’ai pris un repas sucré à midi, je me fais un 4h salé. Vu l’heure, il y a peu de monde et j’ai 5 serveuses pour moi tout seul. On fait bien sûr quelques photos. J’arrive sans encombre dans les faubourgs d’Urumqi, ville de 4 millions d’habitants, le chef lieu de la province du Xinjiang. J’ai 17 kilomètres à faire en ville pour rejoindre l’hôtel réservé par Alicia. C’est sportif. Entre ceux qui se garent comme des pompiers, ceux qui redémarrent sans regarder, les livreurs qui filent dans tous les sens, les petits scooters électriques qui viennent à contresens, il faut frayer son chemin, sans louper les feux. Après 5 kilomètres en ville, un jeune policier m’accoste à un carrefour où je suis arrêté au feu rouge. Il parle sans que je le comprenne évidemment. Il vient voir mon GPS. Il dézoome pour voir ma destination et s’exclame en anglais « Oh my God ». Néanmoins, je parviens à faire les 12 derniers kilomètres sans me tromper et sans difficulté particulière avec aucun autre usager de la route. Néanmoins, ces kilomètres en ville ont pris du temps. Il est près de 20 heures lorsque j’arrive et que je rejoins Alicia. Après la douche, nous allons déguster un bon repas dans un restaurant tout à côté. Je n’ai plus envie de marcher aujourd’hui. Sauf pour une petite promenade digestive dans un parc tout à côté.
Avec 140 plus 175 plus 155 plus 155 kilomètres, je suis à 625 kms en 4 jours au lieu de 6 habituellement. Les 2 jours de repos prévus à Urumqi seront donc bien nécessaires. Ce sera en tout cas un plaisir tant Alicia prend soin de moi et me facilite grandement les choses en plus de me montrer et de m’apprendre plein d’éléments sur son pays.
Je suis chanceux !
Photos sur Polarsteps
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