11 juillet
On se rend au petit déjeuner qui n’est pas servi dans l’hôtel, mais dans un établissement un peu plus loin, pour lequel on dispose chacun d’un voucher de 10 yuan.
Après celui-ci, je me mets en route le premier, il est avant 10h. L’étape d’aujourd’hui, c’est 122 km, avec un dénivelé positif d’un peu moins de 1000 m et sans possibilité de se tromper, il n’y a qu’une route, la G335, qui va nous emmener dans un endroit, à mi-chemin entre Mori et Barkol, 240 km, donc environ 120 aujourd’hui et 120 demain. A notre destination du jour, nous ne disposons pas d’hôtel, on va donc devoir improviser.
Très vite, le panorama devient désertique, je découvre de nouvelles références aux chevaux, ainsi qu’une nouvelle rivière asséchée, dont les berges sont bétonnées, qui ne doit fonctionner qu’en hiver. Ce n’est pas la première fois que j’en vois. Une ou deux familles m’arrêtent pour des photos, et je reçois des pâtisseries locales. Les premiers 50 km sont absolument tranquilles, il n’y a pratiquement pas de circulation. Je peux progresser, d’abord en montée, puis en descente. J’ai très vite remarqué qu’il y a de nouveau une voiture blanche qui me suit, et qui est donc en protec-veillance, nouveau mot que j’ai inventé pour mixer la protection et la surveillance. Je croise un troupeau de moutons, gardés par des hommes à cheval, et je vois mes premiers chameaux. J’arrive ensuite au croisement avec la bretelle d’accès menant à l’expressway G7 (Pékin – Urumqi), qui est parallèle à la G335. Il y a un poste de police, je suis contrôlé. Le policier me demande si je suis étranger. Je lui réponds que oui, avec mon message habituel: je m’appelle Claude, je viens de Bruxelles en Belgique, et je vais à Shanghai. J’ajoute, « pour entrer dans votre pays, j’ai un passeport avec un visa en règle. J’ai déjà été contrôlé 52 fois en 10 jours. Tout est en ordre pour moi ». Cela semble satisfaire le policier qui ne me demande pas plus, et me laisse partir. Commence alors 50 kilomètres plus difficiles. Pour raison d’économie, étant donné que l’expressway est payante, nombre de camions quittent et viennent sur la G335. Dans un premier temps, il y a une petite bande latérale de 80 cm. Ma roue gauche se trouve sur la ligne blanche.Je reçois beaucoup de coups de klaxon des camions lorsqu’ils se croisent. Après une vingtaine de kilomètres, la bande latérale disparaît. Il n’y en a plus du tout. Je suis donc sur la route. Je vois arriver les camions dans mon rétroviseur, et bizarrement, dans cette situation, c’est plus sécure. En effet, là, ils voient qu’ils n’ont pas la place pour passer, et donc ils ralentissent, se mettent derrière, et attendent que ce soit libre en face pour dépasser. Néanmoins, il faut rester très attentif, parce que le plus souvent, c’est 4, 5, voire 10 camions qui se suivent sur ces routes où il est difficile de dépasser. Le premier, un peu plus lent, bloque tous les autres. Ce sont donc 50 kilomètres assez sportifs. J’ai fait un arrêt au tiers au kilomètre 41, un deuxième plus long au kilomètre 82, et à chaque fois, j’aperçois la voiture blanche à bonne distance. À un moment donné, se trouve la bretelle vers l’expressway G7, et là, tous les camions s’en vont, parce que la G335 devient trop sinueuse et trop accidentée… et je retrouve le calme du début d’étape. Ce n’est pas sans soulagement. Il n’y a plus personne. Le vent est plus fort, il y a du dénivelé, et une nouvelle fois, on se retrouve sur Mars. Des décors de collines et de montagnes se succèdent avec pas mal de dénivelé. J’arrive au-dessus de la dernière bosse, a presque 1.800 mètres, et il me reste juste à me laisser descendre vers le point d’arrivée choisi du jour.
Je suis de trois minutes sur un parking, devant quelques commerces, que deux policiers débarquent. Je leur demande où il est possible de loger. Ils me disent qu’il n’y a pas d’hôtel. Je leur demande s’il n’y a pas d’autres possibilités. Je l’ai écrit hier aux autorités de Miro, qui malheureusement ne sont pas compétentes pour cette région: un centre sportif avec des douches, un bâtiment administratif. Ils me disent « rien de rien ». Puis ils s’en vont. Des jeunes s’intéressent à mon vélo, et parmi eux, un qui parle un petit peu l’anglais. Je réitère la demande. Lui et son copain me demandent de les suivre jusqu’au premier commerce de la rangée. On entre. Une discussion s’engage avec le patron, qui indique aux jeunes d’aller voir en face. On quitte donc, on traverse la route, et on va vers une autre rangée de commerces. On entre dans un commerce d’alimentation. Le jeune discute avec le patron, et celui-ci m’emmène tout à côté, dans un bâtiment, où il m’ouvre une chambre à deux lits. Très sommaire, sans salle de bains sans WC, avec un sofa tout pousserieux, et juste un coin pour se laver les mains. Néanmoins, avec le vent qu’il y a, c’est mieux ça que monter la tente.
Sur les entrefaites, Sam arrive. Je lui montre ma trouvaille. On s’installe. Sam me dit, je me demande si la police va te laisser t’installer ici. A peine terminé, voilà que deux policiers arrivent et entrent. S’en suit une grande discussion, au bout de laquelle Sam me dit: les policiers demandent que tu signales si tu as besoin de quelque chose. Je suis donc admis. Et voilà que le policier chinois dit en anglais: Welcome to China. Puis une deuxième voiture de police arrive. On comprend vite que c’est le chef et son adjoint. Nouvelle discussion avec Sam. Ils se tournent vers moi et m’indiquent que les policiers souhaitent faire des photos. On fait donc ça. On se retrouve autour du vélo pour donner toutes les explications sur son fonctionnement et sur mon trajet. Les policiers sont en train de s’en aller puis ils font demi-tour. Ils indiquent à Sam que il y a dans le coin des gens imbibés d’alcool et que, par sécurité, on me demande d’emmener mon vélo au siège de la police. Je rentre donc tous les bagages dont j’ai besoin. Puis, avec une voiture de police devant et une voiture de police derrière, je me rends à un kilomètre de là en installant le vélo dans la cour, incliné pour prendre le soleil au maximum et avec le rideau de protection car on annonce un peu de pluie cette nuit. Je pourrai le récupérer demain. Le contraste est donc saisissant entre le premier contact à l’arrivée et la manière dont les choses se finissent.
Encore une journée qui se termine bien sachant que la localité dispose d’épiceries et de restaurants pour nous alimenter et refaire le stock de provisions.
Photos sur Polarsteps.
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