Au cœur du Henan

7 août

Malgré la longue journée d’hier, le soir, afin que le vélo soit prêt pour un éventuel départ hâtif ce matin, je procède à la réparation du pneu. Le trou est tout petit et il faut beaucoup chercher pour trouver le coupable, un petit filin issu d’un pneu de camion qui se répand partout lorsque celui-ci explose.

Au réveil ce matin, je constate par la fenêtre de la chambre de l’hôtel qu’un groupe de personnes est en train de faire du yoga sur une pelouse synthétique au pied de l’immeuble. Après le petit déjeuner et l’exposition du vélo dans le hall de l’hôtel, nous nous mettons en route. En fait, on ne sait pas trop à quoi s’attendre. Il y a 32 degrés mais il fait très humide, on dirait un climat tropical ou la mousson. Les prévisions météo de plusieurs sources et les radars de pluie se contredisent. On se fie à un qui indique que la pluie devrait venir de l’est, notre destination, et que si on rejoint celle-ci pour 14 heures, on devrait l’éviter.

Il est un bon 9h30 lorsqu’on se met en route. On a fait exactement 323 mètres lorsque la première drache nous tombe dessus. On se met à l’abri sous un arbre et on sort les équipements de pluie. Après quelques minutes, cela diminue très fort, on se remet en route. Mais on a fait 850 mètres, de nouveau le déluge, et là on va se mettre à l’abri dans un passage vers un parking. On a imaginé deux scénarios, aller jusqu’au Mianchi 108 km ou s’arrêter à Sanmexia après 49. Je finis par me dire que c’est un troisième scénario qui va se passer, on va retourner à l’hôtel qu’on vient de quitter. Mais non, après quelques minutes, la pluie s’arrête, on dirait une pluie d’orage, on se remet donc en route. Durant la sortie de ville, on découvre un bâtiment du fisc, quelques immeubles remarquables ainsi qu’une décoration de pont. On se rend compte que trois kilomètres après l’hôtel, ici, il n’a pas plu du tout. Après cinq kilomètres, on oblique à droite et on longe la Hongnong River. C’est un trajet bucolique avec la rivière à droite sur laquelle on peut découvrir des nénuphars, des habitations avec une série de pagodes sur le toit et un immense viaduc. Après une quinzaine de kilomètres, on quitte cette route pour nous retrouver sur un boulevard. C’est une très large avenue qui dispose d’une voie spécifique pour les deux roues, à droite de part et d’autre. Au début, elle fait cinq mètres de large, puis sera plus étroite en agglomération, mais cela va durer 40 kilomètres ! À un moment donné, j’ai un nouveau bruit sur le vélo. Cela semble venir de la roue avant droite. Je pense que c’est le garde-boue qui a bougé. Je le redresse et le remets en position. Le bruit existe toujours. Je passe ma main tout autour de la roue pour finalement découvrir un nouveau bout de filament, issu d’une roue de camion, qui est fiché dans le pneu. Comme c’est un bout assez long, il touche le garde-boue. C’est ça qui fait du bruit. Je l’enlève en étant rassuré: il n’a pas percé le pneu. Dans l’agglomération suivante, nous sommes rejoints et dépassés par un cyclosportif chinois. On dirait un pro.

Au kilomètre 55, le météo nous permet de poursuivre. On a dépassé Sanmexia depuis longtemps et on prend à droite la G310. Changement de physionomie. On est sur une route plus industrielle, avec des camions, avec des dégagements, mais souvent sales. Il commence à y avoir du dénivelé, et on est de nouveau (peut-être la dernière fois ?) dans un décor de montagne. On grimpe pendant longtemps, puis c’est du up and down. Plus on avance, plus on est en site industriel, plus la route est mauvaise, plus les bas côtés sont sales. Au deux tiers de la route, il est 13h, on n’a pas encore eu de pluie. Enfin, on n’en a plus eu depuis Lingbao. On se concerte, moi je suis plutôt partisan d’aller à la destination finale au plus vite, mais le dénivelé, vent de face, a été tel que mes deux compères ont beaucoup consommé, et il faudra faire une recharge. Après être passé à côté d’un viaduc en construction, un de plus, et pendant un épisode de pluie, finalement arrivée, nous faisons arrêt dans une station service, où nous pouvons faire une courte recharge rapide des trois vélos. Il est plus de 14h, un petit magasin juste à côté permet d’aller chercher quelques victuailles en guise de lunch. On se remet en route, la pluie a cessé, il reste une petite vingtaine de kilomètres. La route se dégrade de plus en plus, et les abords deviennent de plus en plus glauques. Des immeubles abandonnés, des stations services désaffectées, des sites genre zones commerciales assez minables, assez sales, des chiens errants, on se croirait dans la zone. On s’approche ensuite de Mianchi, et là aussi il est frappant de voir combien cette ville est sale, avec du brol partout, des routes mauvaises, des logements vétustes. C’est une petite ville intermédiaire, dans le coeur du Henan, entre Lingbao, qu’on a quitté ce matin, et Luoyang, où on arrivera demain.

Quelques discussions pour trouver l’hôtel, et finalement on arrive dans un hôtel du gouvernement, où on est très bien reçus. Il n’y a pas moins de 6 personnes pour porter mes bagages jusque ma chambre.

La route industrielle, avec les camions, qui perdent du charbon, et le vent de face, a aujourd’hui soulevé beaucoup de poussière. La lessive quotidienne de ma tenue de vélo laisse aujourd’hui un jus particulièrement noirâtre.

Nouvelle journée, nouvelles découvertes. Ce soir, on essayera de trouver une stratégie pour demain, en fonction des infos météo disponibles.

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